Le mot d’Éric…
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autrement
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Rubrique incontournable du Journal , Le Mot d’Éric jette un éclairage nouveau sur des sujets d’actualité. Pour cette édition spéciale, nous avons puisé dans un échange entre Éric et certains de nos collègues pour aborder différentes facettes de notre Vision 2030-2050. Y a-t-il de la place pour le développement de notre réseau gazier dans la Vision 2030-2050 ? Pourquoi s’associer à Hydro-Québec pour développer une offre de biénergie ? Comment les clients réagiront-ils ? Pourquoi ne pas mutualiser le GNR et l’offrir à tous nos clients ? Isabelle, Sylvain, Marysol et Ben, tous employé(e)s d’Énergir en contact quotidien avec nos clients, ont posé leurs questions à Éric, qui a accepté de se prêter à l’exercice.
Collaborateurs spéciaux : Isabelle Simard, Sylvain Fauchon, Marysol Beauséjour et Bendaoud Boukouiss
Pour visionner un extrait de la rencontre
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Éric : Le réseau gazier est toujours d’actualité, mais il est appelé à contribuer différemment au cours des prochaines années. Vous le savez, on doit décarboner les activités de notre société. Le développement à grande échelle du réseau risque d’être moins pertinent dans cette optique. Le financement des grands projets de prolongement de réseau des dernières années reposait fortement sur des subventions. Par exemple, à Montmagny, 45 des 50 millions de dollars investis provenaient de subventions. Il y a de moins en moins de projets rentables. On met donc maintenant l’accent sur le maintien de la clientèle et la qualité de notre relation avec elle. Cela dit, c’est principalement dans les secteurs agricole et industriel que le réseau devrait se développer dans les prochaines années.
Éric : Ça dépend des solutions que nous offrons. Il faut être réaliste : si un client veut se construire à l’électricité, personne ne va l’obliger à choisir la biénergie ou le GNR. On sait que les gros édifices sont moins intéressants pour Hydro-Québec parce que leurs besoins en électricité sont très grands, et cette situation se maintiendra probablement pour les prochains développements. Toutefois, pour Énergir, le marché résidentiel est moins rentable. Il faudra que l’on puisse offrir des solutions de biénergie aux nouveaux quartiers qui se construiront, ou le GNR, par exemple, aux clients qui voudront être carboneutres, mais nous ne déploierons pas nos plus grands efforts dans le secteur résidentiel.
Éric : Nos actionnaires sont toujours derrière nous. On l’a vu il n’y a pas si longtemps lorsqu’on a privatisé Valener : ils ont réinvesti dans l’entreprise. Déjà, à l’époque, la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) était un investisseur innovant en ce qui concerne les changements climatiques. Elle a pourvu son portefeuille d’investissement de cibles de réduction d’intensité de carbone. Elle suit donc de près ce que l’on fait, et on tire très bien notre épingle du jeu. Le GNR, ça fait presque 10 ans ! Par rapport à d’autres entreprises du secteur, on est clairement à l’avant-garde. Nos actionnaires aiment ça ! Ils veulent influencer et soutenir les entreprises pour qu’elles changent et s’adaptent aux attentes de la société. Pour cette raison, nous devons garder notre cap. Nos actionnaires ont énormément d’intérêt pour nos projets, autant au Québec qu’ailleurs.
« Nos actionnaires ont énormément d’intérêt pour nos projets, autant au Québec qu’ailleurs. »
Éric Lachance
Le plan stratégique est toujours valable, mais on l’a actualisé avec la Vision 2030-2050. Rappelons-nous, l’année dernière, deux politiques environnementales ont été lancées : Le Plan pour une économie verte, du gouvernement du Québec, et le Plan climat, de la Ville de Montréal. Il fallait donc s’inscrire dans ces plans avec des solutions, sans quoi on aurait pu faire face à des mesures comme l’interdiction du gaz naturel à certains endroits, par exemple. On a établi de nouveaux constats, proposé de nouveaux objectifs, revu nos cibles et lancé quelques initiatives qui ne figuraient pas dans le plan stratégique d’origine, dont la biénergie et l’hydrogène. Tout n’y était pas à changer non plus. On avait déjà mis en place l’efficacité énergétique, l’approvisionnement responsable et le GNR, des initiatives qui se trouvaient dans notre plan stratégique.
Présentement, on s’attaque principalement au secteur du bâtiment, parce que des gains rapides peuvent y être obtenus en matière de réduction des émissions de GES avec des outils technologiques matures. Les objectifs de décarbonation dans l’industrie du gaz naturel, de 2030 à 2050, s’appuieront sur des technologies qui ne sont pas matures au moment où on se parle. Par exemple, pour l’hydrogène, il y a encore beaucoup de chemin à faire. On parle également de plus en plus des technologies de capture du carbone, qui peuvent avoir énormément de retombées pour nous. Si la capture du carbone pouvait se faire à grande échelle, plutôt que de passer à l’électricité, à l’hydrogène ou au GNR, des clients industriels pourraient utiliser le gaz naturel et en capter les émissions de GES.
Maintenant que la pression environnementale est de plus en plus forte, on investit beaucoup dans ces technologies pour la survie de certaines industries. Pas plus tard que la semaine dernière, l’Agence internationale de l’énergie a dévoilé ses scénarios pour 2050 et a affirmé qu’on ne peut écarter aucune solution technologique tellement le défi est important.
Éric : Selon la structure du marché aujourd’hui, on constate que la production de gaz naturel est rentable à partir d’un prix à trois dollars le GJ. À ce prix, les producteurs peuvent fournir tout ce dont on aura besoin pour les 20-25 prochaines années. Donc, fondamentalement, ils n’ont pas besoin d’un prix plus élevé.
Éric : Pour ceux qui connaissent l’histoire, Énergir a déjà été dans le giron d’Hydro-Québec, de 1997 à 2004, de mémoire. Ça n’a pas été un succès à l’époque. Il faut dire que ce sont deux produits différents. Mais les choses ont changé. Aujourd’hui, Énergir est pas mal plus grosse qu’elle ne l’était. Donc, c’est une transaction qui serait compliquée parce qu’on est maintenant un joueur important au Vermont également. Je tiens à dire que la collaboration avec Hydro-Québec a débuté avant même que Sophie Brochu n’en prenne la présidence. Celle-ci comprend bien les avantages qu’Énergir peut apporter à la gestion d’un système énergétique, et c’est précieux. Ce n’est pas la présence de Sophie Brochu à sa tête qui fait qu’Hydro-Québec voit des avantages à travailler avec Énergir, mais c’est plutôt parce que nos énergies sont d’une complémentarité intéressante.
Éric : Hydro-Québec propose la biénergie avec le mazout depuis des années. Présentement, le gouvernement pousse la décarbonation. Souvent, décarbonation et électrification sont synonymes pour bien des gens. Mais Hydro-Québec ne pourra pas fournir à la demande si la décarbonation passe uniquement par l’électricité. La question est de trouver des solutions logiques sur le plan économique pour électrifier une partie des marchés.
On a la volonté de répondre ensemble au problème des GES. Le gouvernement a demandé une réduction de 50 % des émissions de GES dans le secteur du bâtiment d’ici 2030, et la biénergie est apparue comme la meilleure solution pour l’ensemble de la société. Reste à savoir comment on partagera la facture parce que la décarbonation représente un coût supplémentaire. Hydro-Québec, avec la biénergie, évite des coûts importants. Chez Énergir, on doit actualiser notre modèle d’affaires pour qu’il génère de la valeur et demeure concurrentiel pour la clientèle. Toute la subtilité est là.
Éric : Pas du tout. En fait, une grande partie de la hausse découle du modèle réglementaire. En effet, l’augmentation importante en 2022 compense pour les baisses tarifaires des dernières années. La hausse est aussi nécessaire pour couvrir les avantages sociaux, dont les fonds de pension, les assurances, etc. Une grande partie de ce que l’on facture au client sert à l’entretien de nos actifs qui sont notamment enfouis dans le sol, évalués à 2,2 milliards de dollars et constituant l’investissement des actionnaires. Dans le cadre de la Vision 2030-2050, on travaille avec des solutions qui visent à protéger les revenus de distribution tout en réduisant les volumes. Il faut donc agir avec prudence. Cette année, on a demandé aux équipes de vérifier le rythme auquel on fait de nouveaux investissements pour penser aux coûts futurs. Pour éviter que les tarifs absorbent complètement les coûts associés à nos nouvelles initiatives, il faut repenser nos façons de faire pour dégager des marges de manoeuvre avec lesquelles nous pourrons financer des projets d’avenir.
Éric : Nous avons réfléchi à quelques stratégies. La première est d’être proactif avec les parties prenantes qui représentent des bassins de clientèle. Dès qu’on a déposé le dossier tarifaire, nos équipes ont contacté différentes associations de clients et le gouvernement pour leur expliquer les raisons de la hausse. C’est certain qu’on outillera les équipes des ventes et le service à la clientèle, qui sont en première ligne pour répondre aux questions des clients, pour que tous en comprennent bien les raisons. Le message demeure qu’avec cette hausse, on revient environ au niveau de 2019. Et selon les variations tarifaires des dix dernières années, on reste sous l’inflation. Mais malheureusement, les gens se souviennent des hausses de tarifs… La Régie et les intervenants doivent entendre notre cause. Si cette hausse est acceptée, un plan d’accompagnement des employés et de la clientèle sera déployé.
« On essaie de développer la biénergie pour que ça ne coûte pas plus cher aux clients de l’utiliser. »
Éric Lachance
Éric : En fait, les différentes solutions envisagées ont des coûts différents et répondent à des besoins différents. C’est pourquoi on veut miser sur un portefeuille d’initiatives plutôt que sur une seule initiative. À première vue, c’est vrai que la biénergie peut sembler contre-intuitive et ça peut être insécurisant puisqu’on diminuera volontairement nos volumes. En revanche, les avantages sont significatifs : on conserve notre clientèle, on demeure crédible et on fait partie de la solution. On essaie de développer la biénergie pour que ça ne coûte pas plus cher aux clients de l’utiliser.
En ce qui concerne le GNR, on n’est pas en mesure d’avoir des quantités aussi importantes qu’on le souhaiterait du jour au lendemain. On travaille sur un plan pour y arriver et plusieurs projets de production sont sur la table au Québec, ce qui contribuera à augmenter les volumes. Mais il y a d’autres solutions. L’efficacité énergétique est LA solution la plus avantageuse en termes de coût par tonne de GES évitée. On diversifie les solutions et même si le GNR revient moins cher et qu’il est concurrentiel comparé à la nouvelle production électrique, il n’en demeure pas moins que son prix est plus élevé pour les clients. Ce ne sont pas tous les clients qui ont les moyens de passer au GNR et qui vont tout de suite choisir cette solution. C’est la combinaison de l’efficacité énergétique et du GNR qui permettra de réaliser de façon très économique la décarbonation de certains types de clients. En ce qui concerne la biénergie, on essaie de la développer pour que ça ne coûte pas plus cher au client de l’utiliser.
Éric : On a besoin d’usines pour produire le GNR et ce sont de petits volumes dans plusieurs localités. Nous devons acheter du GNR à l’extérieur du Québec pour être en mesure de l’offrir aux clients qui en veulent. Même si on injectait ce GNR directement dans notre réseau, sans attendre de le vendre à des clients, nous aurions le même déficit de volumes disponibles. Prenons par exemple un client comme L’Oréal, qui consomme du GNR. Son siège social lui demande d’être 100 % carboneutre. Donc, si nous ne sommes pas capables de lui vendre 100 % de GNR, il va nous quitter. Comme on n’a pas beaucoup de GNR, la Régie nous a imposé un seuil maximal en termes de volumes pour pouvoir en faire profiter le plus grand nombre de clients. Mais même sans la Régie, on fait face à une réalité : on doit être capable de fournir du GNR aux clients qui doivent être carboneutres et, en même temps, on a d’autres clients qui, pour des raisons de compétitivité internationale, comme les grands industriels, sont très sensibles au prix. Le GNR, ça demeure plus cher. C’est un avantage d’avoir des clients qui en demandent, car on épargne ceux qui ne veulent pas payer plus. Cela dit, si on en a plus et qu’on est capable de le vendre, on va le mutualiser. Mais actuellement on a certains clients qui ont de grandes ambitions et on veut évidemment les garder.
Éric : Ça se peut qu’on arrive effectivement avec une offre plus personnalisée. L’hydrogène est aussi un marché qui offre plusieurs options, alors ce sera intéressant de voir comment la stratégie de commercialisation sera développée. Dans le fond, c’est un gaz qui est manufacturé. Il est possible que l’hydrogène soit distribué via les nouvelles portions du réseau ou qu’il soit porté, comme on le fait avec le gaz naturel liquéfié ou le gaz naturel comprimé. Donc ça va nous ouvrir différentes avenues. On développe une feuille de route de l’hydrogène qui nous permettra de nous positionner dans les prochaines années.
Éric : En fait, ce pourcentage concerne le secteur du bâtiment. Avec la biénergie, on vise les besoins énergétiques en période de pointe. Pour les heures les plus froides en hiver, le gaz naturel serait utilisé et hors des périodes de pointe, l’électricité répondrait à la demande. Selon nous, 70 % des volumes passeront à l’électricité dans une partie de ce secteur. On ne s’est pas prononcé sur l’ensemble des volumes des autres marchés. Prenons notre client industriel Arcelor Mittal qui, à lui seul, représente presque 10 % de nos volumes. Il ne sait pas encore s’il utilisera le gaz naturel ou l’hydrogène ou même l’électricité pour une partie de ses activités. Mais il faut lui présenter des solutions. Si notre produit n’est pas carboneutre, il faut lui proposer quelque chose qui rendra ses activités carboneutres.
Éric : On a deux projets en cours. D’abord, à l’ÉTG, on fait des essais dans un petit réseau. Nos ingénieurs travaillent pour qu’en 2022, on puisse injecter l’hydrogène et mesurer les réactions des équipements et du réseau. On a un autre projet en parallèle avec notre filiale ECCU. Des chaudières à gaz naturel à l’ECCU approvisionnent en chaleur les grands édifices du centre-ville de Montréal par une canalisation de vapeur. On y fera aussi un test d’injection d’hydrogène. On souhaite évaluer la quantité d’hydrogène que le réseau pourra livrer d’ici trois à quatre ans. On veut savoir à quel endroit on pourra en injecter et quelles seront les répercussions chez les clients selon la qualité de la flamme ou l’intensité de l’énergie.
Éric : Oui, nous faisons de la veille technologique, notamment au sujet des technologies de thermopompe à gaz naturel qui pourraient compléter notre offre. En même temps, on discute avec différents fabricants pour mieux comprendre les appareils. Les technologies du marché résidentiel sont plus matures que celles des marchés commercial et institutionnel, notamment. On gagne à collaborer avec des associations ou d’autres entreprises gazières à ce sujet. Travailler juste avec le Québec, c’est bien, mais si on peut consulter d’autres joueurs au Canada, voire en Europe, c’est encore mieux.
Éric : Tout d’abord, je veux préciser que notre filiale Standard Solar ne fabrique pas de panneaux solaires, mais elle les conçoit et les installe. On a donc une expertise pour percer dans ce créneau. Toutefois, la réalité actuelle du marché au Québec y est moins favorable. L’énergie solaire est super intéressante parce qu’elle est renouvelable et de plus en plus abordable. Au Québec, l’électricité est moins chère qu’aux États-Unis, ce qui fait que le solaire a plus de difficulté à percer le marché québécois. Mais ça ne veut pas dire qu’il n’y en aura pas. Par ailleurs, Hydro-Québec s’intéresse aussi à l’énergie solaire. Dans le sud des États-Unis, le contexte est favorable à l’énergie solaire, car les besoins en électricité sont très grands durant la saison chaude, et c’est la période où il y a le plus d’ensoleillement, alors qu’au Québec, c’est l’hiver que la demande en électricité est la plus élevée et qu’il y a le moins d’ensoleillement.
Pour l’éolien, les perspectives sont meilleures. Hydro-Québec compte d’ailleurs faire de nouveaux appels d’offres. Rappelons qu’Énergir est déjà active dans l’énergie éolienne, notamment avec ses parts dans les parcs éoliens de la Seigneurie de Beaupré.
On le dit souvent, ça prend un portefeuille de solutions. Il n’y a pas qu’une bonne solution, même si on aimerait bien dire qu’on a la formule magique. L’idée, c’est de diversifier, de ne spas mettre tous ses oeufs dans le même panier.